Postion du SNESUP cur l’arrêté de certification en langues 20/04/20
CERTIFICATION EN LANGUE
Déclaration commune AECIUT-APLIUT
L’APLIUT, confirmant sa position exprimée dans le texte de 2007,
s’associe à l’AECiut sur cette déclaration commune :
• Les certifications en langue étrangère, notamment l’anglais
(TOEIC…), et même désormais la langue française
(Certification Voltaire) se sont imposées, ou tentent de le
faire, dans le paysage universitaire français. En effet, au nom
d’un impératif socio-économique (dynamiser les exportations
et les échanges internationaux, renforcer la réussite des
étudiants), et d’une logique de démarche qualité, il est tentant
pour les universités, à l’instar de beaucoup d’écoles
d’ingénieur, ou d’écoles de commerce, de faire labelliser leurs
formations en les faisant accréditer par des organismes
internationaux.
• Cette recherche de la qualité et de l’excellence est un objectif
louable. Mais il est foncièrement étrange de conclure que les
enseignants de langue sont toujours considérés comme des
non spécialistes, puisqu’on tente de leur imposer
régulièrement une évaluation extérieure, le plus souvent
effectuée par des organismes anglo-saxons privés, et qu’on
leur dénie en conséquence la capacité à évaluer eux-mêmes
le niveau de langue de leurs étudiants. Attitude d’autant plus
étrange qu’on n’imagine pas un enseignant de mathématiques,
de physique nucléaire, de géophysique ou de psychologie
sociale faire évaluer ses étudiants par de tels organismes.
• De plus, ces certifications posent de réels problèmes au
moment où les instituts universitaires technologiques, déjà
bien avancés sur le sujet, mettent en place un peu partout des
approches programme fondées sur l’acquisition de
compétences. En effet, être compétent en langue, c’est être
capable de mobiliser ses connaissances dans des situations de
communications variées afin d’affronter les situations diverses
du monde professionnel. Or, l’approche structuropsychométrique telle qu’elle utilisée par le Test of English for
International Communication (TOEIC) et Test of English as a
Foreign Language (TOEFL) – réduit les enseignements à des
entrainements intensifs pour réussir ces tests. Cette approche
très réductrice ne permet pas de former les étudiants à une
réelle capacité à interagir. Il en va de même pour des
certifications en langue française qui ne sauraient évaluer
sérieusement les multiples compétences que doit mettre en
œuvre un étudiant en termes de communication écrite et
orale. Seuls un enseignement et une évaluation qui permettent
de simuler des situations d’échanges crédibles et relativement
complexes sont un gage de réussite dans le cadre d’une
approche qui souhaite attester des compétences.
• Ajoutons que c’est aux équipes pédagogiques, en appui avec
les différents partenaires institutionnels et internationaux de
déterminer elles-mêmes le contenu d’un certificat, tant à un
niveau interne à l’établissement qu’à un niveau plus large.
• Certes, tout enseignant est libre d’utiliser tel logiciel et de
faire passer telle accréditation. Mais L’APLIUT ainsi que
l’AECIUT refusent catégoriquement toute imposition d’une
certification extérieure émanant d’un organisme privé, au
nom d’une conception républicaine et éthique de
l’enseignement, qui doit laisser la liberté pédagogique aux
acteurs concernés, et essayer de conserver au maximum la
gratuité des études.
• Ainsi, depuis de nombreuses années, les enseignants de
langue réclament le droit d’attester eux-mêmes du niveau de
leurs étudiants selon le CECRL et notamment par la mise en
place d’une mention langue sur leur diplôme, ou, à défaut, de
considérer que le système de notation interne suffit à définir
le niveau de langue en question.
Assemblée Générale, le 1er juin 2018 à Toulouse
J. Farigoux, Présidente de l’APLIUT
Réactions sur la question de la certification
Cher M. Rotgé, cher.e.s membres du bureau de la SAES,
Nous souhaitons réagir à la diffusion le vendredi 15 février dernier d’un communiqué du bureau de la SAES concernant la question de la certification, dans le cadre de la mise en place du dernier arrêté « licence » du 30 juillet 2018.
Nous souscrivons pleinement aux raisons du désaccord : pression démesurée exercée sur les anglicistes du secteur LANSAD, rétrécissement annoncé de ce secteur sur une langue unique, dégradation de notre discipline par le truchement de tests QCM, main mise à très grande échelle d’une multinationale sur des programmes universitaires.
Face à ce constat, le bureau de la SAES promeut le CLES, une certification qui suscite un réel attrait, essentiellement lié au fait qu’elle soit publique. Mais cette modalité ne saurait être envisagée comme l’unique réponse proposée par notre communauté.
Comme toute certification déployée massivement dans des établissements ayant vocation à former à une très grande variété de disciplines, le CLES produira, comme les autres, les effets pervers de la standardisation d’une discipline vers une norme unique. Cette norme, dont on peut penser qu’elle sera le CLES B2 pour la licence, n’est souhaitée ni par le monde socio-économique et universitaire (en recherche de personnes capables d’affronter immédiatement les réalités discursives liées à des domaines universitaires et professionnels divers), ni par les anglicistes de spécialité (engagés depuis de nombreuses années dans la conception de programmes sur mesure, en phase avec ces réalités discursives). Par exemple, le CLES B2 ne permet pas de savoir si une jeune archéologue pourra exercer son métier dans une langue étrangère (savoir mobiliser des concepts en histoire de l’art et savoir communiquer dans plusieurs langues sur un site de fouilles à l’étranger). Le CLES B2 ne permet pas non plus de savoir si un jeune technicien informatique saura résoudre un problème technique en anglais. Pourtant, ces compétences sont des attendus tout à fait légitimes.
Un autre effet pervers de la généralisation d’une certification unique, aussi publique soit-elle, est son coût considérable, qui devra être porté soit par les étudiants eux-mêmes, soit par les universités. Il faudra rémunérer les collègues mobilisés pendant des jours entiers et recruter ou mobiliser du personnel administratif pour organiser des sessions concernant des milliers d’étudiants sur plusieurs semaines. L’ensemble alourdira le travail des équipes d’anglicistes parfois exsangues dans certaines composantes et pourrait amener ces dernières à supprimer les cours d’anglais de spécialité, afin de faire face à ces nouvelles dépenses dans un cadre budgétaire « à moyens constants ».
Un troisième effet pervers que nous souhaitons souligner est l’inévitable standardisation des connaissances dans un secteur d’enseignement dont la richesse repose précisément sur la diversité des disciplines et la diversité des enjeux des niveaux des compétences propres à chacune d’elles. Il deviendra alors très difficile de justifier l’existence de formations sur mesure qui, logiquement, remportent un grand succès auprès des spécialistes des disciplines et auprès du monde extérieur à l’université.
Nous en venons à un dernier effet qui découle des précédents : l’affaiblissement considérable d’une branche active de notre communauté, celle de la recherche en anglais de spécialité et de sa didactique. Comment motiver à long terme une recherche aussi fondamentale pour le secteur LANSAD si les formations pour un diplôme comme la licence convergent toutes en direction d’une norme pensée à l’avance ?
Nous souhaitons donc contribuer activement au débat au sein de la SAES sur la base des propositions suivantes :
- L’utilisation à grande échelle d’entreprises privées pour attester des compétences en langue représente un danger pour l’autonomie intellectuelle des universités ;
- La mise en place d’une certification unique à grande échelle compromet l’équilibre financier des universités car elle concerne la très grande majorité des inscrits ;
- La compétence en langue ne saurait être mesurée sur la base d’une certification unique ;
- La mesure de la compétence en langue ne saurait être effectuée au détriment du plurilinguisme ;
- Amener la SAES à soutenir le développement d’outils variés d’attestation des compétences valorisant les formations en langues propres au domaine de spécialisation des étudiants et orientées vers leur entrée dans le monde professionnel.
Vous comprendrez qu’il ne s’agit pas d’exclure le CLES mais de le présenter comme une option envisageable parmi d’autres dont certaines, comme les certificats de compétences en langues de spécialité intégrés aux modalités de contrôle des connaissances ou l’accréditation de formations en langues de spécialité, méritent l’attention de la communauté des enseignants de langues du supérieur ainsi que celle de notre Ministère.
Bien cordialement,
Philippe Millot, MCF anglais de spécialité, Université Jean Moulin, Lyon 3
Séverine Wozniak, MCF anglais de spécialité, Université Grenoble Alpes
Michel Van der Yeught, Université Aix Marseille, Président du GERAS
Joëlle Farigoux, université de Limoges, Présidente de l’APLIUT
Christopher Gledhill, Université Diderot Paris 7
Shirley Carter-Thomas, Institut Mines-Télécom École de Management
Gwen Le Cor, Université Vincennes-Saint-Denis, Paris 8
Dacia Hammouda, Université de Clermont-Ferrand
Marie-Hélène Fries, Université Grenoble Alpes
Shaeda Isani, université Grenoble Alpes
Natalie Kübler, université Diderot Paris 7
Laura Hartwell, université de Toulouse
Shona Whyte, Université Côte d’Azur
Marie-Françoise Narcy-Combes, Université de Nantes
Linda Terrier, Université de Toulouse
Marie-Agnès Détourbe, Université de Toulouse
Geneviève Bordet, Université Diderot, Paris 7
Susan Becaas, Université de Bordeaux
Jean-Pierre Charpy, Université Bourgogne Franche-Comté
Marion Del Bove, Université Jean Moulin, Lyon 3
Anne-Marie Barrault-Methy, Université de Bordeaux
Camille Biros, Université Grenoble Alpes
Alice Henderson, Université Grenoble Alpes
Valérie Braud, Université de Bordeaux
Bénédicte Reyssat, Université Bourgogne Franche-Comté
Laura-May Simard, Université Diderot, Paris 7
Samia Ounoughi, Université Grenoble Alpes
Margaux Coutherut, Université Paris 8
Cédric Sarré, ESPE de l’académie de Paris
Thibault Marthouret, Université de Bordeaux
Frédérique Freund, Université Savoie Mont-Blanc
Joline Boulon, Université Claude Bernard, Lyon 1
Rebecca Franklin-Landi, Université de Nice-Sophia Antipolis
Helena Lamouliatte-Schmitt, Université de Bordeaux
Noella Gaigeot, Le Mans Université
Carole Maserati, Université Jean Moulin, Lyon 3
Pascal Cudicio, Université Paris 2
Anaïs Carnet, Université Bourgogne Franche-Comté
Joëlle Popineau, Université de Tours
Ana Laura Vega Umaña, Université de Bordeaux
Laure-Line Ribaud , Université Clermont Auvergne
Marie-Pierre Baduel, Université de Toulouse
Catherine Colin, ENS Cachan
Daniel Frost, Université Grenoble Alpes
Nicoleta Alexoae-Zagni, Université Vincennes-Saint-Denis, Paris 8
Inesa Sahakyan, Université Grenoble Alpes
Corinne Landure, Université de Lorraine
Virginie Rouxel Segaut, Université Bourgogne Franche-Comté
Sylvie Gautier, Université de Limoges
Gaëlle Oding, Université de Haute Alsace
Eglantine Lecomte, Université Claude Bernard, Lyon 1
Evgueniya Lyu, Université de Liège
Chantal Guigue, Université La Réunion
Kate Brantley, Université de Lille
Alison Leonard, Université Bretagne Sud
Maud Pérez, Université Claude Bernard, Lyon 1
Céline Longin, Université de Poitier
Frédéric Hache, Faculté des sciences et techniques, Université Jean Monnet, Saint-Etienne
Julie Morère, IUT de Nantes