Toulouse, le 18 décembre 2021
Madame, Monsieur la/le Président.e. de l’Assemblée des Chef.fe.s de Département,
La réforme du DUT par la création du BUT s’est faite (et continue de se faire) à un rythme effréné et dans un contexte sanitaire dégradé qui impacte les conditions de consultation et d’intégration des acteurs de proximité de la formation. Le cas des langues vivantes est un exemple particulièrement significatif. L’APLIUT (Association des Professeurs de Langues des IUT) n’a pas été invitée à participer aux débats.
Le constat est très amer pour les enseignants de langues vivantes : dans les programmes nationaux du BUT, les volumes horaires alloués à l’enseignement de ces disciplines ont subi une baisse drastique, sans consultation, ni explication, en comparaison avec ceux inscrits dans les Programmes Pédagogiques Nationaux du DUT (une moyenne de 100 heures dans les PN par rapport à 200 heures, voire 250 heures pour les DUT plus LP). Par exemple en Information-Communication, cela s’est traduit par une diminution d’heures très conséquente pour les mêmes attendus : presque moins 50 % du volume horaire, ainsi à partir de la mi-octobre, il n’y a plus d’enseignement de langues vivantes dans cette spécialité au semestre 1.
Nous questionnons ces choix de baisse de volume horaire : si les baisses ont affecté de façon globale l’ensemble des disciplines, elles sont plus marquées encore en LV1 et LV2. Comment cela peut-il se justifier alors que :
– en langues vivantes, l’enseignement de LANgues pour Spécialistes d’Autres Disciplines (secteur LANSAD) est une spécificité caractéristique des IUT qui s’inscrit dans l’esprit du BUT et qui permet de situer les apprentissages au cœur des spécialités étudiées, des compétences métiers visées et d’une adéquation à la demande de développement à l’international, qui correspond tout à fait à l’approche par compétences prônée par le BUT.
– la proportion de bacs technologiques recrutés ayant été portée à 50% dans les BUT, comment peut-on gérer une hétérogénéité de profils d’apprenants plus grande qu’auparavant avec moins d’heures d’enseignement ? Comment peut-on les faire tous progresser avec un temps pédagogique réduit ? Le travail en autonomie est évoqué pour pallier la réduction horaire mais les étudiant.e.s ont besoin d’être encadré.e.s pour réussir, et l’encadrement constitue l’ADN des IUT depuis leur création.
– les attendus (pédagogiques, professionnels, d’internationalisation) demeurant les mêmes, une telle baisse dégrade les conditions d’enseignement et d’apprentissage des langues et rend très difficile la progression des étudiant.e.s quand un minimum de 150 heures est estimé nécessaire pour passer d’un niveau du Cadre Européen Commun de Référence pour les langues à l’autre.
Par ailleurs, nous ne pouvons que regretter que dans un certain nombre de spécialités qui proposent l’enseignement de deux langues vivantes, une mise en concurrence ait été induite en laissant le choix aux départements de proposer, en plus de la LV1, soit de l’anglais renforcé, soit une LV2 mais pas les deux (et ce seulement en première année, la LV1 renforcée ou LV2 disparaissant à partir de la 2e année). Quid de la promotion du plurilinguisme vivement recommandée par le Conseil de l’Europe (Le Conseil de l’Europe et l’éducation aux langues (coe.int) ) et de l’insertion professionnelle attendue dans un monde mondialisé ?
Le développement des compétences en langues étrangères constitue l’une des actions que le gouvernement entend développer pour s’adapter à la concurrence économique mondialisée en rendant obligatoire la passation d’une certification en anglais (courrier de la DGESIP du 5 janvier 2021). L’arrêté du 3 avril 2020 (article 4) liste les 5 DUT auxquels s’applique cet arrêté, dont le DUT d’Information-Communication, spécialité qui paradoxalement perd la moitié de ses heures en langues. La spécialité Techniques de Commercialisation, figurant également dans la liste de ces 5 DUT, ayant les mêmes attentes d’internationalisation, a subi une moindre perte de ses heures, de l’ordre de 10% à 15% en première année. Comment cela peut-il se justifier ? Et comment peut-on réduire les volumes horaires en anglais au moment où on requiert des étudiant.e.s qu’ils se présentent à une certification ?
Afin d’assurer la soutenabilité économique de la formation, certains IUT ont demandé d’avoir une répartition égale à 30% de CM et 70% de TD sur l’ensemble de chaque semestre, dans le PN seul le nombre total d’heures CM/TD étant indiqué. Les enseignants de langues se voient ainsi imposer des CM alors que les langues, depuis la création du DUT, ont toujours étaient enseignées en TD et TP et que paradoxalement les CM apparaissent en langues alors qu’ils disparaissent du PN. Quel savoir-agir complexe peut-on faire mobiliser dans un CM d’anglais ? Ces CM en langues vont à contre-courant de l’approche par compétences, comme indiqué par Marianne Poumay du Labset, lors d’une conférence le 1er juin 2021 à Toulouse. Ils ne favorisent pas non plus la motivation des étudiants pour l’apprentissage des langues.
Tout cela contribue encore plus à la perte du caractère national du diplôme du BUT en générant des situations très hétérogènes d’un département à l’autre pour une même spécialité, et d’une spécialité à l’autre au sein d’une même CPN (IC et MMI pour le traitement de la LV2), sans mentionner le pourcentage de la mise en place du PN, qui varie de 84% à 100% selon les IUT, diminuant d’autant plus les heures attribuées dans le PN et accentuant la disparité des situations. Les langues deviennent alors une variable d’ajustement dans les départements par rapport au budget alloué pour assurer les heures d’enseignement.
Pour toutes ces raisons et aussi pour le plus grand bénéfice des étudiant.e.s, afin de garantir leur réussite et la qualité de la formation, nous souhaitons vivement une révision à la hausse des heures ressources en langues vivantes en BUT 1 et une prise en compte de ces éléments pour l’affectation des heures ressources en BUT 2 et 3 (en cours d’écriture mais laissant déjà apparaître la même tendance à la baisse).
Pour l’APLIUT,
Danielle JOULIA, Présidente.