COMMUNIQUÉ DE PRESSE
ANNULATION DE LA CERTIFICATION OBLIGATOIRE EN ANGLAIS
Dans sa décision du 7 juin 2022, le Conseil d’État a fait droit au recours déposé par les 15 associations en septembre 2020 et annule donc le décret et l’arrêté du 3 avril 2020 portant sur l’obligation de se présenter à une certification en anglais pour obtenir une licence, un DUT ou un BTS
Rappel des faits
En dépit de protestations de tous horizons et d’un vote défavorable du conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), le 3 avril 2020 paraissait un décret qui conditionnait l’obtention de diplômes de 1er cycle de l’enseignement supérieur à la simple passation d’une « évaluation externe » en langue anglaise – sans condition d’obtention, de résultat ou de niveau minimal. Dès sa parution, l’ensemble de la communauté universitaire et scientifique s’est opposé à ce décret, dénonçant entre autres :
– une atteinte au plurilinguisme au sein des universités par la seule obligation de l’anglais et, de ce fait, un appauvrissement des profils des étudiants et étudiantes en termes de langues vivantes.
– le financement d’organismes privés par de l’argent public pour l’obtention d’un diplôme national public, puisque le Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (MESRI) imposait des certifications venant d’organismes certificateurs privés (le coût total de cette mesure se serait élevé, à terme, à 32 millions d’euros).
Interpellé à plusieurs reprises par de nombreux courriers d’associations, de sociétés savantes et universitaires, d’hommes et de femmes politiques ou encore de pétitions, le MESRI n’a jamais répondu aux demandes de dialogue. Aussi 15 associations civiles et universitaires, non syndicales, ont–elles décidé de déposer un recours devant le Conseil d’État.
Loin de retirer sa mesure décriée et contestée, le gouvernement a désigné comme prestataire une société privée grecque, LanguageCert, quasi inconnue alors même que l’argument phare du Ministère pour justifier la mise en place de cette mesure résidait dans la « reconnaissance internationale et par le milieu socio-économique » de la certification choisie. Mis devant sa propre contradiction, le Ministère a fini par dénoncer le marché qu’il avait lui-même initié tout en maintenant l’obligation de certification, renvoyant aux établissements d’enseignement supérieur la responsabilité de la mise en œuvre du décret.
Celle-ci s’est avérée particulièrement problématique, à tous les niveaux. En effet, le coût financier de cette opération a excédé l’enveloppe budgétaire allouée par le MESRI. Le coût organisationnel a également été très important, puisque ce sont les établissements qui ont dû fournir les personnels pour la surveillance et la correction, ainsi que les salles et le matériel. Dans le cas où ils avaient opté pour des sessions en ligne, il est apparu que les étudiants devaient être surveillés par des sociétés de télésurveillance rémunérées par les organismes de certification.
Décision du Conseil d’Etat
Après presque deux ans d’instruction, deux mémoires déposés et une audience publique, les juges du Conseil d’État ont suivi les conclusions du rapporteur public et ont donc considéré que le décret attaqué méconnaissait le deuxième alinéa de l’article L. 613-1 du code de l’éducation. En d’autres termes, le décret est frappé d’illégalité car « seuls les établissements accrédités par l’État peuvent délivrer les diplômes nationaux conduisant à l’obtention de grades ou de titres universitaires, tels ceux énumérés à l’article D.613-6 du code de l’éducation », ce qui exclut de fait les certifications issues de structures privées.
Par conséquent, le décret du 3 avril 2020 relatif à la certification en langue anglaise pour les candidats à l’examen du BTS, ainsi que l’arrêté du 3 avril 2020 relatif à cette certification pour les candidats inscrits aux diplômes nationaux de licence et de DUT sont annulés, à l’exception de l’article 2 et du II de l’article 4 de l’arrêté, portant sur la licence professionnelle.
Concernant les licences professionnelles, il est offert la possibilité aux associations de demander à la Ministre l’abrogation du décret du 6 décembre 2019, en se basant sur la déclaration d’illégalité du décret du 3 avril 2020 par le Conseil d’État.
Suite à cette décision, deux organisations étudiantes demandent le remboursement par l’État des frais engagés pour la passation de cette certification, tant par les acteurs et actrices de l’enseignement supérieur que par les étudiantes et étudiants.